C'est à Jean Fourquet, professeur de philologie germanique, et à Georges Straka, professeur de phonétique générale
et expérimentale à la Faculté des Lettres de Strasbourg, que revient le mérite d'avoir initié, en 1947, la réalisation d'un atlas linguistique alsacien.
En alliant leurs expériences et leurs savoirs respectifs, ces deux maîtres, qui ne sont pas d'origine alsacienne, ont formé les chercheurs à la
géolinguistique et à l'étude de la variation des dialectes dans l'espace, d'une part, aux méthodes de la dialectologie et à la transcription phonétique des
sons de l'alsacien, d'autre part (cf. E. Beyer 1952 : 434).
Après avoir bénéficié des enseignements et des conseils de ces deux éminents spécialistes,
Ernest Beyer (1) - qu'il convient de considérer comme le fondateur de la dialectologie alsacienne -
se voit confier, en 1948, la réalisation de l'Atlas linguistique et ethnographique de l'Alsace. Il y consacrera, à côté de ses charges
d'enseignant et de chercheur, tous ses efforts et toute son énergie.
Les atlas linguistiques relèvent de la géographie linguistique qui est une branche particulière de la dialectologie. Elle s'assigne comme objet principal
l'étude atlantographique de la variation linguistique, puisque tout dialecte varie dans le temps, dans l'espace et dans la société. C'est toutefois l'aspect
spatial et, partant, les variations dites diatopiques, à un moment donné sur l'axe du temps, qui sont fondamentalement prises en compte dans un atlas
linguistique. Il s'ensuit que les matériaux collectés dans ce but visent à donner une image aussi fidèle que possible des parlers locaux et de leurs
variations phonétiques, lexicales et, pour partie, morphologiques dans l'espace. En raison des principes méthodologiques qui président à la réalisation des
atlas de l'ancienne génération, les aspects syntaxiques ne sont que peu représentés.
Au-delà de son apport à la philologie, à l'histoire de la langue, aux sciences linguistiques et, plus récemment, à la linguistique de corpus, un atlas
fait aussi œuvre culturelle, en ce qu'il contribue à l'inventaire d'un patrimoine linguistique. C'est l'une des raisons pour lesquelles E. Beyer et,
à sa suite, les auteurs du volume II (cf. infra), ont porté leur choix sur des informateurs qui, en raison de leurs compétences et de leurs pratiques
dialectales, peuvent être considérés comme des représentants d'une forme de " norme " dialectale conservatrice (Grundmundart, Basisdialekt).
Il s'ensuit que les données relevées par E. Beyer au cours des années 50 / 60, présentent, par rapport aux dialectes actuels, un caractère archaïsant qui est " d'autant plus marqué que, même dans les villes, l'enquêteur s'est presque toujours adressé à des paysans dont le conservatisme linguistique est bien connu " (Beyer, Matzen, 1969, introduction).
Tout en cherchant à être fidèle à la méthode de l'école de Gilliéron et à intégrer l'ALA dans la collection des atlas régionaux français
(fondée par Albert Dauzat), E. Beyer va, en raison de la situation géographique et géolinguistique de l'espace dialectal alsacien, s'inspirer parallèlement
des méthodes et des principes d'élaboration du Sprachatlas der deutschen Schweiz (Atlas linguistique de la Suisse alémanique, 10 volumes,
1962-2003), qui a été mis en chantier, dès 1937, par le germaniste et folkloriste Heinrich Baumgartner (Université de Berne) et par Rudolf Hotzenköcherle,
professeur de philologie germanique à l'Université de Zurich. Il s'ensuit que l'ALA, établi dans le même esprit et selon des principes théoriques et
méthodologiques comparables à ceux de l'atlas suisse, en constitue " le prolongement naturel et indispensable " (Beyer, 1952 : 434).
Ces principes - qui déterminent la valeur scientifique des études atlantographiques -concernent le domaine exploré et la sélection des points d'enquête, le questionnaire, la conduite de l'interrogation, le choix des informateurs, la transcription des données et, finalement, la présentation et le traitement des matériaux (Pop, 1957 : 246).
Le domaine exploré par E. Beyer couvre, d'une part, les départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, à l'exception des zones situées à l'ouest de la
frontière des langues germano-romanes, d'autre part, la zone limitrophe de la Lorraine germanophone.
Prenant appui sur les données ressortant des enquêtes par correspondance faites en 1874 par le pasteur Louis Gustave Liebich en Alsace, sur les matériaux
du Deutscher Sprachatlas (D.S.A.), fondé par Georg Wenker,de même que sur ses propres enquêtes exploratoires, Ernest Beyer est amené à
retenir 214 localités dont les parlers font partie des aires dialectales franciques (francique rhénan / Rheinfränkisch) et alémaniques
(bas- et haut-alémanique / Nieder- und Hochalemannisch). Les critères de nature linguistique (particularités et / ou caractère plus conservateur de tel ou
tel parler) ont prévalu sur les facteurs géographiques pour la sélection des communes explorées qui se répartissent comme suit :
- 122 dans le département du Bas-Rhin,
- 82 dans le département du Haut-Rhin,
- 12 dans le département de la Moselle.
Dans la mesure où, en moyenne, une localité sur 4,5 a fait l'objet d'une enquête dialectale, la densité moyenne du réseau d'enquête est de 22%.
Le maillage est, toutefois, plus serré dans les zones les plus peuplées. Il est à noter qu'à l'inverse de l'Atlas linguistique et ethnographique de
la Lorraine germanophone (Philipp, Bothorel-Witz, Levieuge, 1977), les villes n'ont pas été écartées comme points d'enquête, ce qui pose, de manière
plus aiguë encore, la délicate question de la représentativité de l'échantillon des informateurs.
A l'inverse des auteurs de l'Atlas de la Suisse alémanique dont les questions, en fonction des centres d'intérêt dont elles relèvent
(travaux agricoles / travaux ménagers, par exemple), s'adressent à des hommes et à des femmes, E. Beyer a le plus souvent interrogé des
sujets masculins qui constituent les deux ou trois informateurs principaux par localité. D'autres personnes (femmes ou hommes) ont, le cas échéant,
pu être choisies pour le recueil de données complémentaires ou des vérifications.
Afin de ne pas collecter des formes dialectales par trop innovatrices ou, a contrario, par trop conservatrices, les personnes interrogées appartiennent
aux tranches d'âge des 45-75 ans. Elles ont pour point commun d'être nées dans la localité explorée ou d'y vivre depuis leur plus jeune âge.
Bien que les possibles incidences des variables " sexe ", " âge ", " religion " n'aient pas été systématiquement exploitées,
les annotations de l'enquêteur dans ses carnets d'enquête rendent compte d'éventuelles variations liées à l'un et /ou à l'autre de ces facteurs.
Cherchant à pallier les inévitables insuffisances des enquêtes par correspondance, qui ont été réalisées, de 1887 à 1888, en Alsace
(alors " Terre d'Empire ") dans le cadre du Deutscher Sprachatlas (DSA) (2),
E. Beyer opte, à l'instar des dialectologues français et suisses, pour la méthode d'enquête directe et orale prônée
par Jules Gilliéron (auteur avec Edmond Edmont de l'Atlas linguistique de la France, Paris : Honoré Champion, 1902-1910). Cette méthode de
collecte visant à recueillir le " mot " ou la désignation linguistique va être affinée par Jakob Jud et Karl Jaberg. S'inscrivant dans le courant
dit Wörter und Sachen, les auteurs de l'Atlas linguistique et ethnographique de l'Italie et de la Suisse méridionale (8 volumes, 1928-1940)
démontrent, de manière exemplaire, la nécessité d'associer les faits linguistiques et les faits ethnographiques ou le " mot " et la " chose "
qui sont liés par l'histoire. Par " chose ", il faut entendre non seulement les objets matériels, les techniques et les pratiques, les traditions, les
coutumes, non seulement la réalité observable, mais aussi l'imaginaire, qui peuvent varier d'une région à une autre. En s'inscrivant dans cette tradition, les
atlas linguistiques deviennent ainsi des atlas ethnographiques dont l'objectif premier reste néanmoins l'étude de la variation des dialectes ancrés non seulement
dans un espace géographique, mais aussi dans un environnement sociétal et culturel.
A l'appui d'un questionnaire pré-établi, les données dialectales recueillies sont transcrites sur place. En Alsace, les enquêtes principales ont eu lieu
entre 1953 et 1965.
Elles seront suivies de relevés complémentaires qui, d'une part, visent à éclairer les points que les données recueillies laissent dans l'ombre, et qui,
d'autre part, permettent d'approfondir les questions qui ressortent du matériel spontané collecté lors des entretiens avec les informateurs
(cf. questionnaire complémentaire, pp. 91 et svtes).
En raison des inconvénients inhérents à la méthode dite de la " conversation dirigée ", qui reste focalisée sur le mot, le recueil des données
a été complété, pour certains des parlers, par des enregistrements de textes oraux. On dispose ainsi d'un discours suivi et d'une parole dialectale
contextualisée qui permet de saisir les variations inhérentes au discours.
Lire le questionnaire
Afin d'inscrire les parlers alsaciens dans un continuum dialectal (les limites nationales et départementales ne constituant pas de frontières
linguistiques) et de ne pas les couper des dialectes voisins, Ernest Beyer prend appui sur le questionnaire de l'Atlas de la Suisse alémanique
qu'il est amené, en s'appuyant sur des études déjà existantes (monographies, dictionnaire de Martin et de Lienhart, données du D.S.A., etc.), en
l'éprouvant par des enquêtes exploratoires, à remanier, à compléter et à adapter aux réalités et aux spécificités du terrain alsacien. L'une des
différences principales entre les deux questionnaires (suisse et alsacien) se traduit, entre autres, par une partie ethnographique moins développée
(les différences de cette nature sont moins prononcées en Alsace), par l'introduction de questions ayant trait à des
notions abstraites (3), et surtout par une orientation plus prononcée du questionnaire alsacien
vers l'étude des variations phonétiques. Tout en ne négligeant pas pour autant les variations sémantico-lexicales, l'intérêt tout particulier porté aux
aspects phoniques a été motivé par l'absence de données antérieures (l'atlas de Wenker n'a tracé que les grandes lignes des caractéristiques phonétiques
de la Teuthonia), par le danger de nivellement linguistique qui gagne les parlers dialectaux et, finalement, par le projet de procéder à des
études phonologiques des parlers pour pallier les insuffisances d'une interprétation par trop atomistique des variations et de la structuration de
l'espace. On peut, à cet égard, rappeler le rôle de précurseur qu'ont joué Jean Fourquet et, à sa suite, Marthe Philipp, dans le développement
d'une dialectologie structurale en Alsace.
Au total, les plus de 2000 questions retenues par E. Beyer sont réparties en six parties qui devaient constituer les différents volumes
prévus pour la publication :
0. Renseignements – questions préliminaires
I : L'individu / der Mensch
II. La famille et la maison / die Familie und das Haus
III. La commune et la société / die Gemeinde und die Gesellschaft
IV. La nature / die Natur
V. La vie rurale et l'agriculture / die Landwirtschaft
Une partie complémentaire (VI) du questionnaire – qui comporte un certain nombre de questions se rapportant à des notions plus abstraites (dénomination des formes, découpage du temps, de la semaine, de l'année …) – porte, parallèlement, sur des aspects grammaticaux des dialectes (morphologie verbale, flexion nominale, déterminatifs [possessifs], pronoms, quantificateurs, adverbes, prépositions et conjonctions). C'est, entre autres, sur ces données que E. Beyer a pris appui dans son ouvrage sur La flexion du groupe nominal en alsacien (1963).
Le questionnaire qui sert de base à une " conversation dirigée " est rédigé en français et transposé en alsacien lors des enquêtes sur le terrain ; celles-ci se déroulent dans la langue usuelle de l'informateur, à savoir le dialecte local, auquel E. Beyer s'efforce, autant que possible, de s'adapter. La formulation très précise des questions - qui, pour des raisons de comparabilité, reste inchangée d'un informateur à un autre - consiste à faire trouver le mot ou l'expression dialectale en plaçant l'informateur dans un contexte qui lui facilite la tâche et qui ne nuit pas à la spontanéité des réponses. L'ordre des questions est organisé par centre d'intérêts (dans l'ALA, on commence par les termes concernant le corps humain) et selon un ordre qui est censé faciliter la transition d'une question / réponse à une autre. Le plus souvent, le procédé utilisé par l'enquêteur est de nature onomasiologique : il consiste, en conséquence, à fournir la définition du signifié en vue d'obtenir le signifiant dialectal correspondant (comment appelle-t-on le commerçant qui fait le pain ? - - - le boulanger). Une autre forme de suggestion linguistique conduit, selon les cas, à faire un geste, à proposer une image (celle d'un fruit ou d'un légume, par exemple), voire une phrase qu'il convient de compléter par le terme recherché (" on ramasse les balayures avec - - - la pelle "). Plus rarement, l'enquêteur peut partir d'un signifiant dialectal (exemple : springen) pour déterminer les variations du signifié (" sauter " ou " courir ") dans l'espace considéré (procédé sémasiologique). Il arrive toutefois qu'une question (quelle que soit la procédure de questionnement retenue) reste sans réponse, parce que, dans une aire dialectale donnée, le concept n'existe pas (certaines variétés d'oiseaux dans les vallées, par exemple) ou parce qu'il n'est pas dénommé (c'est ainsi qu'au nord de Strasbourg, il n'existe pas de terme dialectal pour " s'accroupir " [Beyer, 1957 : 348]). En tirant profit du matériel spontané, recueilli lors des enquêtes, E. Beyer a été en mesure de collecter, d'une part, des termes non prévus dans le questionnaire initial, d'autre part, des mots grammaticaux dont le recueil est plus difficile. Ces données figurent dans la troisième colonne des feuilles de transcriptions (cf. infra).
Les réponses aux questions posées ont été transcrites sur des feuilles qui reprennent les pages du questionnaire d'enquête. Chacune de ces feuilles
consultables dans la banque de données (où elles sont classées par localité) se limite à 25 réponses numérotées (par page) dont les questions et les
pages correspondantes peuvent être retrouvées dans le questionnaire reproduit sur le site. Dans l'esprit d'Ernest Beyer, les données ainsi regroupées
par localité constituaient une forme de monographie locale qui " permet au chercheur de se faire une idée d'ensemble d'un parler donné "
(Beyer, 1952 : 452).
Afin de pallier les dangers de l'autosuggestion, le transcripteur a cherché " à reproduire le plus fidèlement possible
toutes les nuances phonétiques (…), sans se préoccuper de les grouper dans des catégories fixées d'avance " (Pop, 1970, tome 1 : 570).
Le système de transcription retenu est, pour l'essentiel, le même que celui des atlas suisses (cf. Hotzenköcherle, 1962) et, plus généralement, des atlas du
domaine dialectal germanique. Il reprend, dans les principes, les conventions de Boehmer et d'Ascoli en utilisant des signes orthographiques qui sont associés
à des signes diacritiques. C'est ainsi qu'un point placé sous la voyelle indique son timbre fermé ; inversement, le crochet marque le timbre ouvert de la voyelle,
etc.). Pour les détails du système de transcription adopté par E. Beyer et la correspondance avec les sons de l'allemand, on peut se reporter à la " notation
phonétique " extraite de l'introduction au volume I de E. Beyer et de R. Matzen, qui est reproduite sur ce site.
La raison d'être des atlas est, depuis leurs débuts, la représentation de la variation diatopique sur des cartes linguistiques. La cartographie pose le problème du choix du procédé cartographique et de son degré d'adéquation aux faits qu'elle est censée traduire (Ravier : 2000 : 985). Bien que la banque de données ne donne pas accès aux cartes linguistiques (publiées), on peut signaler que les auteurs du volume I ont opté pour deux types de procédés cartographiques. Le premier consiste, dans la tradition gilliéronienne, à reporter sur la carte de référence la forme originale sous chacun des points d'enquête. Quand une même forme a été relevée dans des parlers contigus dans l'espace, elle figure (en caractère gras) au milieu d'une aire dialectale qui, en raison du continuum dialectal, n'est pas délimitée sur la carte. A l'instar de l'atlas suisse, L'ALA comporte des cartes à symboles auxquels correspondent des formes lexicales, phonétiques ou des faits morphologiques typisés dont la distribution spatiale devient plus immédiatement lisible. Chaque carte est accompagnée d'une légende comportant la question posée lors de l'enquête, des indications ou des précisions se rapportant aux signifiants dialectaux cartographiés, voire des ajouts de formes (archaïques, …) non cartographiées. Les renvois aux dictionnaires des domaines dialectaux voisins (Pays de Bade, Souabe, Suisse, Lorraine) visent à illustrer la continuité dialectale entre les parlers alsaciens et ceux des espaces dialectaux immédiatement contigus.
Bas-Rhin : |
Hirschland (Alsace Bossue, canton de Drulingen), |
Haut-Rhin |
Sondernach (Vallée de Munster) |
(1) E. Beyer occupe la chaire de linguistique et de dialectologie allemandes (1964-1970) et dirige, de 1960 à 1970, l'Institut de Dialectologie alsacienne de l'Université de Strasbourg.
(2) Le questionnaire de Georg Wenker (quarante phrases) fut envoyé vers 1888 aux instituteurs de l'Alsace, alors terre d'Empire (Reischsland). Les réponses sont conservées à Marbourg. A ce jour, près de 600 cartes de l'Atlas linguistique de l'Empire allemand sont disponibles en ligne sur le site DiWA (Digitaler Wenker-Atlas). Les cartes digitalisées, disponibles gratuitement sur le net, ont été réalisées sous la direction de Jürgen Erich Schmidt et de Joachim Herrgen, au Forschungsinstitut für deutsche Sprache de Marburg (RFA).
(3) Cf. dans la première partie du questionnaire (" l'Homme ") (qui est reproduit sur le site), les pages consacrées aux " Activités et dispositions de l'esprit ".
BEYER Ernest (1952) : " Deux entreprises, un même esprit : l'Atlas linguistique de la Suisse alémanique et celui de l'Alsace ", in : L'Alsace et la Suisse à travers les siècles, Strasbourg, 429-464.
BEYER Ernest (1957) : « Le questionnaire de l’Atlas linguistique de l’Alsace », in : Imbs P., Straka G. (textes publiés par), Textes des communications du Colloque de dialectologie, 21 et 22 avril 1956, Strasbourg, Bulletin de la faculté des Lettres de Strasbourg, 35e année, fasc. 5-6, 340-355.
- (1959) : « Champs, assolements et labours en dialecte alsacien », in : Paysans d’Alsace, ouvrage de la Société savante d’Alsace et des régions de l’Est, Strasbourg : F.-X. Le Roux, 469-522 (9 cartes).
(1965) : « Réalisations et projets de la recherche dialectale alsacienne », in : Communications et rapports du premier Congrès International de Dialectologie générale, (Louvain : 21-25 août, Bruxelles : 26 et 27 août 1960), Quatrième partie, 55-63.
BEYER Ernest / MATZEN Raymond (1969) : Atlas linguistique et ethnographique de l'Alsace, Volume I : Paris : Editions du C.N.R.S.
CHAURAND Jacques (1972) : Introduction à la dialectologie française, Paris : Bordas.
Deutscher Sprachatlas (DSA), bearbeitet von WREDE F., MARTIN B., SCHMITT Ludwig Erich, Bde. 1-20, Marburg 1927-56.
FOURQUET Jean (1952) : « Dialectologie alsacienne à l’Université de Strasbourg depuis 1945 », in : Orbis, Bulletin International de Documentation Linguistique, Tome I, n° 1, Louvain : Centre International de Dialectologie Générale, 185-192.
HOTZENKÖCHERLE Rudolf (1962) : Einführung in den Sprachatlas der deutschen Schweiz. A. Zur Methodologie der Kleinraumatlanten, B. Fragebuch, Transkriptionsschlüssel, Aufnahmeprotokolle, Bern.
IMBS Paul / STRAKA Georges (textes publiés par) (1957) : Textes des communications du Colloque de dialectologie, 21 et 22 avril 1956, Strasbourg, Bulletin de la faculté des Lettres de Strasbourg, 35e année, fasc. 5-6,
POP Sever (1950) : La dialectologie : aperçu historique et méthodes d’enquêtes linguistiques, Louvain : J. Duculot, 2 volumes.
SEGUY Jean (1973) : « Les atlas linguistiques de la France par régions », in : Langue française 18 (Les parlers régionaux), 65-90.
STRAKA Georges, SIMON Péla (1960) : « Quarante d’Etudes de Linguistique et de Philologie à l’Université de Strasbourg (1919-1959) », in Orbis, Tome IX, N° 2, Louvain, 495-551.
RAVIER Xavier (2000) : « Les atlas linguistiques régionaux. Une entreprise plurielle dans son unicité (1950-1997), in : Antoine G., Cerquiglini B., (dir.), Histoire de la langue française (1945-2000), Paris : Editions du CNRS, 981-1004.
TUAILLON Gaston (1976) : Comportements de recherche en dialectologie française, Paris : Editions du CNRS.
En raison de la mort prématurée d'Ernest Beyer (1970) et des lourdes charges qui incombent alors à Raymond Matzen, co-auteur de l'ALA I, le CNRS confie, en 1979,
l'élaboration de l'Atlas linguistique de l'Alsace à Marthe Philipp et à Arlette Bothorel-Witz (déjà co-auteurs, avec Guy Levieuge, de l'Atlas linguistique et
ethnographique de la Lorraine germanophone (ALLG, vol. I, 1977), auxquelles va venir se joindre Sylviane Spindler.
Devant la difficulté d'exploiter les données collectées et transcrites par E. Beyer et en l'absence d'une expérience approfondie du terrain alsacien qui ne s'acquiert
qu'à travers le contact avec les informateurs, il a été décidé d'entreprendre de nouvelles explorations, d'autant que les premières enquêtes ont eu lieu plus de 20 ans
plus tôt.
Ce nouveau départ de l'entreprise atlantographique alsacienne ne va pas fondamentalement remettre en cause les principes et les méthodes qui ont présidé à
l'œuvre d'Ernest Beyer. La méthode d'enquête (enquête directe, orale), la conduite de l'interrogation, les principes de représentation cartographique
(carte de référence, cartes à symbole, légendes) restent les mêmes. Pour des raisons qui sont liées au développement des techniques, mais aussi à l'évolution des
positionnements épistémologiques, la poursuite du chantier des atlas est néanmoins marquée par un certain nombre de changements.
Comme dans les atlas plus récents, on opte pour l'enregistrement intégral des enquêtes, qui permet de garder la trace du sujet parlant, de ses remarques, de ses
hésitations, de ses reprises, d'une part, de mesurer les incidences du contexte interactionnel, d'autre part. Le choix de cette méthode indirecte, a trois conséquences
majeures : elle constitue un gain de temps considérable (la totalité des 219 enquêtes effectuées par Arlette Bothorel-Witz et, pour partie, par Sylviane Spindler
a été réalisée de 1980 à 1981) ; elle permet au transcripteur (qui a été Arlette Bothorel) de procéder à autant de réécoutes que nécessaires. Finalement,
elle donne lieu à la constitution d'archives sonores qui peuvent être exploitées pour de nouvelles recherches.
Une autre modification touche le choix des points d'enquête et la densité du maillage. La même équipe ayant été responsable de l'Atlas de la Lorraine
germanophone, les 12 localités mosellanes retenues par E. Beyer ne sont plus maintenues comme des points d'enquête de l'ALA. Il s'agit de communes se situant dans
les cantons de :
- de Phalsbourg : |
47 Mittelbronn, 87 Arzwiller, 86 Dabo, 50 Danne-et-Quatre-Vents, 85 Garrebourg, |
- de Fénétrange : |
42 Mittersheim |
- d'Albestroff : |
41 Vibersviller |
- de Sarrebourg : |
88 Walscheid, 89 Hartzwiller |
- de Bitche : |
5 Baerenthal, 6 Sturzelbronn |
- de Rohrbach : |
4 Montbronn |
On ajoutera que 103 Illkirch-Graffenstaden (communauté urbaine de Strasbourg) et 144 Wihr-en-Plaine (canton d'Andolsheim) ont été, respectivement, remplacés par
Schiltigheim (communauté urbaine de Strasbourg) et Andolsheim (canton de Neuf-Brisach).
Finalement, 17 nouveaux points d'enquête (6 dans le Bas-Rhin, 11 dans le Haut-Rhin) ont été ajoutés à la liste existante. Ils se répartissent comme suit :
-Bas-Rhin : | 4 Wingen (canton de Wissembourg), 55 Neuhaeusel (canton de Bischwiller), 65 Wilwisheim (canton de Hochfelden), 101 Krautergersheim (canton d'Obernai), 110 Andlau (canton de Barr), 111 Le Hohwald (canton de Barr) |
-Haut-Rhin : | 137 Walbach (canton de Wintzenheim), 143 Geiswasser (canton de Neuf-Brisach), 145 Logelheim (canton de Neuf-Brisach), 149 Muhlbach-sur-Munster (canton de Munster), 191 Rosenau (canton de Huningue), 192 Village-Neuf (canton de Huningue), 199 Gildwiller (canton de Dannemarie), 201 Bretten (canton de Dannemarie), 211 Durmenach (canton de Ferrette), 217 Liebsdorf (canton de Ferrette), 219 Oberlarg (canton de Ferrette) |
Au total, le nombre de communes alsaciennes retenu pour l'étude des parlers passe de 202 localités à 218 (121 à 127 dans le Bas-Rhin, 81 à 92 dans le Haut-Rhin).
Des critères géolinguistiques fondent le rajout des points d'enquête le long ou à proximité de la frontière nationale (le long du Rhin), de la frontière des langues
germano-romane ou dans les vallées (Vallée de Munster en particulier) dont les parlers présentent un fort degré de variance à la fois interne et externe
(cf. Bothorel-Witz, Vetter, 1989, 1990a, 1990b). Ces choix ont pour conséquence une modification de la liste et de la numérotation des points d'enquête de E. Beyer
(cf. liste des points d'enquête de l'ALA II).
Dans le but de renforcer la comparabilité des espaces mosellan et alsacien (entre lesquels les limites administratives n'interrompent en aucune manière le continuum
dialectal) et de disposer de cartes communes, l'ordre prévu dans le questionnaire de E. Beyer a été modifié. Le volume I de l'ALLG était consacré tout comme le volume I
de l'ALA à l'Homme mais aussi aux animaux domestiques. Il s'ensuit que les enquêtes réalisées pour le volume II (publié) de l'ALA n'ont pas porté comme prévu sur
la deuxième partie du questionnaire d'Ernest Beyer (la famille et la maison), mais sur des chapitres des quatrième et cinquième parties, à savoir :
1. les animaux domestiques (V. chapitre 29 du questionnaire de Beyer), 2. les oiseaux (IV. chapitre 2), les insectes, poissons, reptiles, batraciens, 3. les
petits mammifères, 4. la chasse et le gibier (IV. chapitre 26), 5. les astres et les phénomènes atmosphériques (IV. chapitre 20). Pour les raisons exposées plus haut,
le questionnaire d'enquête initial a été remanié et augmenté : il comporte les questions prévues pour les deux atlas alsacien et lorrain. Il s'ensuit qu'un tiers des cartes qui figurent dans l'ALA n'avait pas été prévu dans l'entreprise initiale.
Les archives sonores auxquelles donne accès la banque de données ne se limitent pas à la seule collecte des données dialectales exploitée dans le volume II.
Elles incluent aussi toutes les enquêtes réalisées en vue de l'élaboration du volume III La nature (non publié) qui devaient inclure :
- le relief, route, hydrographie (cf. questionnaire de Beyer, IV. Nature, chap. 21),
- la forêt et l'exploitation forestière (cf. questionnaire de Beyer, V. La vie rurale : chap. 38),
- les arbres (non fruitiers), les plantes sauvages, les fleurs, les fruits (cf. questionnaire de Beyer, partie IV, chapitres 23, 22, 24, 25),
- le jardin et les produits du jardinage (cf. V. la vie rurale et l'agriculture, chapitre 37).
Le remaniement du questionnaire et les nouvelles explorations ne diminuent en rien l'intérêt des enquêtes de E. Beyer. Au-delà de leur valeur patrimoniale,
elles constituent une base de comparaison précieuse avec des données plus récentes : elles permettent, en particulier, de mesurer l'évolution des parlers
dialectaux entre les premières enquêtes commencées en 1953 et les dernières effectuées en 1980 / 81. Ces changements (qui sont signalés en marge des cartes du
volume II) montrent qu'au plan du lexique des formes spécifiquement dialectales, voire locales ont disparu au profit de lexèmes empruntés au français, voire
à l'allemand (Vierfüssel, Eglas ou Ejlas (‘lézard') disparaissent au profit de Eidechs [cf. allemand : Eidechse]).
Au plan phonétique, l'analyse des nouvelles données montre, entre autres, que le phénomène de palatalisation des anciens û, uo est en nette
progression (les formes non palatalisées comme Mul (‘bouche') ou Fueter (‘fourrage') régressent au profit des formes palatalisées
Mül ou Füeter. Inversement, l'aire de palatalisation des voyelles brèves devant nasale et consonne (Hünd, Hönd ‘chien')
se rétrécit sous la poussée de la forme dominante Hund (‘chien'). Ces évolutions, qui sont au centre des recherches dialectales actuelles ont fait
l'objet de plusieurs publications (Bothorel-Witz / Huck, 2000). Pour cette question, on se reportera, en particulier, à la publication de
D. Huck (" Die elsässischen Dialekte im Hinblick auf die Repertoiredynamik der Sprecher ", 2009) mise en ligne sur ce site.
D'autres changements entre les travaux atlantographiques de E. Beyer et de R. Matzen et ceux des auteurs du volume II ne sont pas développés dans le cadre imparti
(cf. introduction du volume II.). On signalera toutefois que le tome II de l'ALA a été le premier des atlas régionaux français à avoir été informatisé.
Bas-Rhin : |
Hirschland (Alsace Bossue, canton de Drulingen), |
Haut-Rhin |
Sondernach (Vallée de Munster) |
BOTHOREL-WITZ Arlette / PHILIPP Marthe / SPINDLER Sylviane (1984) : Atlas linguistique et ethnographique de l'Alsace, Volume II : Paris : Editions du C.N.R.S.
BOTHOREL-WITZ Arlette / VETTER Sabine (1989) : « Vers une identification des types dialectaux alsaciens : Essai de typologie automatique », in : Bouvier J.C., Martin J.B., Contini M. (eds), Espaces romans, Etudes de dialectologie et de géolinguistique offertes à Gaston Tuaillon, Vol. II, Grenoble : ELLUG, 488-509.
BOTHOREL-WITZ Arlette / VETTER Sabine (1990a) : «Lexikalische Datenanalysen im elsässischen Sprachraum», in : PHILIPP M. (Hrsg.), Alemannische Dialektologie im Computer-Zeitalter, 9. Arbeitstagung alemannischer Dialektologen, Straßburg, September 1987, Göppingen : Kümmerle, 61-89.
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HUCK Dominique (2009) : « Die elsässischen Dialekte im Hinblick auf die Repertoiredynamik der Sprecher », 16. Tagung für alemannische Dialektologie. Wege in die Zukunft, 7.-10. September 2008, Universität Freiburg (Schweiz)